La relation d’aide semble être évidente lorsque l’on est manager. Oui, mais c’est tout sauf évident à réaliser : notre humeur du moment, notre niveau d’énergie, nos préoccupations, nos biais cognitifs, nos enjeux personnels, sont autant de pièces qui rendent le puzzle de l’accompagnement difficile à construire.

En quoi les dispositions non-directives sont-elles une clé de l’autorité en management ?
L’autorité suppose de créer les conditions de croissance de l’autre (Cf. Michel SERRES, 1er article de la série). Pour soutenir la croissance de l’autre, il s’agit de l’appréhender, de le connaitre, de le comprendre. La bonne perception de
l’environnement et de ses interlocuteurs est donc essentielle dans ce rôle qui peut conférer l’autorité. Être convenablement connecté à son environnement est une chose et nécessité vigilance, attention, bon sens. Mais quelle
est la perception de nos collaborateurs sur ce que nous sommes ? Le fait d’être aligné et de se comporter de manière démocratique, de manière non-directive dans les situations qui le nécessitent renforce la perception positive de ce que
nous sommes et favorise l’autorité conférée.

De quoi parle-t-on exactement lorsque l’on évoque des dispositions non directives ?
Pour répondre, allons tout d’abord puiser chez Carl Rogers. Chez ce dernier, la non-directivité est l’un des caractéristiques de son approche centrée sur la personne. La non-directivité, c’est laisser à l’interlocuteur la possibilité
de s’exprimer et de choisir le cours de son expression. L’écoutant, le manager, loin de vouloir contrôler la relation et les entretiens par des interventions directives, respecte totalement son interlocuteur et lui laisse donc la liberté de
choisir le cours du processus.

Ensuite, demandons-nous ce qui caractérise vraiment les relations de soutien et de développement.

  • Dans la relation parent-enfant, l’attitude d’ouverture démocratique est la plus favorable à l’épanouissement (Baldwin, A.L., Kalhorn, J. et Breese, Patterns of parents behavior).
  • Dans la relation thérapeute-patient, la compréhension de la carte du monde de l’autre, l’implication personnelle dans la relation et les objectifs liés à la personnalité de l’autre sont des caractéristiques d’efficacité (Betz, B.J. et Whitehorn, The relationship of the therapist to the outcome of therapy in schizophrenia)
  • Dans la relation d’aide, plusieurs études démontrent que l’authenticité, la confiance éprouvée par la personne aidée, le fait de se sentir compris, de pouvoir prendre des décisions en toute autonomie, la sympathie et le
    respect mutuel sont des facteurs de réussite de la relation (Cf. les travaux de Heine, Fidler, Quinn, Dittes entre autres).
    Même si ces études n’apportent pas de réponse définitive et abordent la question sous différents angles, on voit clairement ressortir les deux paramètres fondamentaux de la réussite des relations de soutien et de développement. Les attitudes de la personne aidante d’une part (manager) et la perception de la relation par la personne aidée d’autre
    part (managé).

 

Comment alors créer une relation d’aide la plus efficace possible ?
D’après Carl Rogers, une dizaine de questions et d’observations apportent quelques éléments de réponse. Je vous épargne les questions :

  • Être soi, être congruent, comportement que les autres jugent digne de confiance
  • Être transparent quant à ses sentiments
  • S’autoriser à manifester chaleur, attention, affection, intérêt
  • Assumer sa singularité avec l’altérité de l’autre (ex : avoir le même respect pour ses besoins que pour les siens)
  • Être suffisamment solide pour consentir à chacun d’être singulier
  • Faire preuve d’empathie pour entrer dans l’univers de l’autre sans juger, sans piétiner son sens, pour
    comprendre les erreurs plus que de les fustiger
  • Accepter chacune des facettes de personnalité de l’autre
  • Se comporter avec tact pour ne pas être perçu comme une menace (Cf études sur le réflexe psychogalvanique)
  • Le rapport au jugement et à l’évaluation à soigner, idéalement à supprimer
  • Voir l’autre comme une personne en devenir (limiter le biais de confirmation, l’étiquetage par le passé)
  • En conclusion, j’appuierai sur ce que je crois être le plus fondamental dans ce sujet. Le fait que cette mission, cette
    entreprise d’aide, de soutien, de rapport à l’autre de manière plus globale est l’une des plus fondamentales qui soit
    dans l’avenir de l’espèce. En effet, notre destin est commun car interdépendant, et de la qualité de nos relations va
    dépendre le chemin que l’espèce prendra. Il est donc essentiel de travailler à son propre épanouissement pour être en
    mesure d’accompagner les autres avec le plus de justesse possible, vers une destinée commune qui respecte l’altérité
    de chacun.